Un an après son ouverture, quel premier bilan dresser pour Bel Air Textile, ce tiers-lieu de la région lyonnaise rassemblant des PME de la filière textile ? Éléments de réponse après une visite sur place.
En 1930, au plus fort de l’industrialisation française, la municipalité de Villeurbanne (Rhône) favorisait la création de cités-jardins dans le quartier populaire de Bel-Air. Cent ans plus tard, la zone a bien changé. De nombreux sites industriels ont été démolis, laissant à disposition des friches prêtes à accueillir de nouvelles constructions. Aujourd’hui, on y trouve notamment le Médipôle Lyon-Villeurbanne, un méga-centre hospitalier ouvert en 2019, et quelques mètres plus loin, un imposant bâtiment, orné d’acier Corten, inauguré en juin 2024 : Bel Air Textile. Un espace de 2 800 m² qui se veut « un lieu repère des acteurs de la filière textile », comme le présente Marie-Sophie Verney-Carron, directrice marketing et communication.
ENCOURAGER LES SYNERGIES
Le projet a émergé grâce à Bel Air Camp, réseau français de tiers-lieux business, en collaboration avec Crafters, professionnels du marquage bien connus dans la filière promotionnelle, la CCI Lyon Métropole Saint-Étienne Roanne et l’association à but non lucratif Unitex. « On bénéficie d’une assise solide avec des acteurs importants, bien implantés et légitimes. Ils viennent d’horizons divers, du métier du textile aux collectivités publiques. Cela forme un ensemble très complémentaire », résume Lucas Sassot, camp manager de Bel Air Textile.
L’ambition globale du lieu ? Dynamiser la filière textile et encourager les collaborations entre ses acteurs, afin de générer un maximum de business. Depuis son inauguration, Bel Air Textile accueille une grande diversité d’entreprises, des jeunes pousses comme des sociétés confirmées – Showtex existe depuis 40 ans. La plupart sont lyonnaises, mais pas seulement. « Chacun peut trouver sa place et grandir », commente Mme Verney-Carron.
Car l’une des forces de Bel Air Textile, c’est de savoir animer sa communauté, afin de créer des synergies et des passerelles. « Il ne faut pas se méprendre, Bel Air Textile n’est pas un lieu de mode ou de création textile pure et dure, explique Lucas Sassot. C’est un lieu dédié à l’industrie textile au sens large, du design graphique à la R&D, en passant par la scénographie ou le conseil commercial. Les entreprises hébergées retrouvent une communauté qui parle le même langage, avec les mêmes problématiques et objectifs. » Certaines passerelles sont évidentes, comme entre Crafters et Vangart. Les deux entreprises évoluant dans la broderie, elles achètent leurs consommables auprès des mêmes sources et sur des volumes conséquents, afin de tirer les prix.
ATELIER PARTAGÉ
Ce qui frappe d’emblée en entrant dans Bel Air Textile, ce sont les clins d’œil au passé industriel du quartier, faits de structures apparentes en métal ou de lignes jaunes signalétiques peintes au sol. Le lieu n’est pas froid pour autant, largement égayé par l’accrochage d’œuvres d’art produites in situ et l’installation de mobilier couleur pastel. Les volumes sont beaux et la distribution des espaces des plus fonctionnelle. En somme, on perçoit une atmosphère agréable, propice au travail, sans verser dans l’écueil tape-à-l’œil d’une ambiance incubateur de start-ups à l’américaine.
En ce mardi matin, l’ambiance est studieuse. Des groupes de travail se sont formés au rez-de-chaussée du bâtiment, qui comprend des bureaux, des espaces partagés, un studio photo, ainsi qu’un atelier partagé de 750 m². Appelé la BA Factory (pour « Bel Air Factory »), il s’agit du cœur du réacteur de toutes les opérations relatives à la production, du marquage textile au stockage. Ici, pas moins de 70 têtes de broderie sont intégrées et d’autres technologies sont hébergées : sublimation, transfert, ou encore DTF.
Et qui dit atelier partagé, dit échange d’expertise, innovation collective et mutualisation du matériel. « Le but, c’est d’utiliser l’espace de la meilleure des façons pour offrir une prestation industrielle de qualité, à hauts volumes ou en petites séries, et pour maximiser la rentabilité de nos membres », explique Damien de Bélizal, responsable de la BA Factory. D’autant plus que le lieu est installé dans une zone stratégique et facilement accessible, entre le périphérique lyonnais, le métro vers le centre-ville et une liaison immédiate vers l’aéroport de Saint-Exupéry. De quoi assurer un circuit court et une réactivité toujours plus essentielle sur le marché publicitaire.
M. de Bélizal avance un autre atout de l’atelier : la digitalisation de l’offre. « Nous offrons dès à présent un atelier 2.0, mais qui sera encore plus digitalisé demain. On va mettre l’accent sur le service client, en étant dans l’anticipation et le suivi automatisé des commandes.» Plus globalement, Bel Air Textile se veut porteur d’innovation. « La filière textile accuse parfois un peu de retard sur cette question. Nous avons pris le virage avant certains, donc ce lieu constitue un pari et des ajustements sont en cours, mais nous sommes convaincus d’être sur la bonne voie pour co-construire l’avenir de la filière textile française », prophétise Marie-Sophie Verney-Carron.